L’accès à une eau de qualité et à des systèmes d’assainissement gérés de manière sûre est un droit humain et constitue le 6e des 17 Objectifs de Développement Durable de l’Organisation des Nations-Unies. Pourtant, et malgré de réels progrès au cours des 15 dernières années, une partie importante de la population mondiale est toujours privée de ce droit fondamental.
Etat des lieux : l’eau dans le monde
L’eau couvre environ 70% de la planète, c’est-à-dire environ 1.4 milliards de km³, dont 97,2% sont constitués d’eau salée. Les 2,8% d’eau douce restants sont très majoritairement composés de glace polaire. Les eaux souterraines, de surface et atmosphériques, qui sont utilisables pour la consommation humaine, ne représentent ainsi que 25% de cette eau douce, et se renouvellent à des vitesses très variables – 16 jours en moyenne pour une rivière et 17 ans pour un lac-.
Géographiquement, la répartition de l’eau douce potentiellement consommable est également très inégale. Neuf pays dans le monde détiennent 60% des ressources naturelles – le Canada, la Chine, la Colombie, le Pérou, le Brésil, la Russie, les Etats-Unis, l’Indonésie et l’Inde-, alors que 80 états, dans lesquels vit 40% de la population globale, souffrent de pénurie d’eau.
L’utilisation de l’eau douce est essentiellement agricole. L’irrigation des terres cultivées, à des fins d’alimentation des populations notamment, est en constante augmentation depuis le début du 20e siècle, et s’est accrue de 60% au cours des 60 dernières années. En moyenne, l’agriculture consomme 70% de l’eau douce disponible dans le monde, et cette proportion peut monter à 90% dans certaines zones arides ou semi-arides.
Hors agriculture, les activités industrielles prélèvent 20% de l’eau douce, et la consommation domestique les 10% restants. Avec, là encore de fortes disparités : on consomme ainsi 300 litres par jour et par habitant aux Etats-Unis, entre 100 et 200 litres en Europe, et seulement moins d’une dizaine de litres dans les pays les plus pauvres.
Accès à l’eau et à l’assainissement : des inégalités très marquées
La proximité d’une source d’eau potable est aujourd’hui assurée pour 90% de la population mondiale (contre 76% il y a 30 ans), mais près de 2,5 milliards de personnes manquent encore d’installations sanitaires de base, telles que des toilettes ou des latrines.
Par ailleurs, plus de 80% des eaux usées, du fait de l’activité humaines, sont rejetées sans aucune dépollution dans les rivières ou dans les mers. Cette situation cause chaque jour, en moyenne, la mort de1 000 enfants, victimes de maladies dues à de mauvaises conditions d’assainissement et d’hygiène.
C’est très clairement sur le continent africain que les conditions sont les plus précaires. La moitié des personnes qui consomment une eau issue de sources non protégées vivent ainsi en Afrique sub-saharienne, et seuls 24% de la population y a accès à une eau potable sûre. Les installations sanitaires de bases – non partagées- n’y sont en outre réservées qu’à 28% des habitants.
Plus en détails, ces inégalités géographiques se complètent de d’inégalités sociales : ainsi, les filles et les femmes supportent l’essentiel de la charge de la collecte de l’eau, à laquelle elles consacrent chaque jour un temps estimé à plus de 30 minutes. De même, dans les zones urbaines, les habitants de quartiers pauvres non alimentés en eau courante paient souvent l’eau 10 à 20 fois plus cher que leurs voisins des quartiers plus favorisés.
Quels risques et quelles perspectives ?
Dans leur dernier rapport sur la mise en valeur des ressources en eau1, les Nations-Unies soulignent que « si la dégradation de l’environnement naturel et les pressions insoutenables sur les ressources mondiales en eau se poursuivent, 45 % du PIB mondial et 40% de la production céréalière mondiale seront en danger d’ici 2050 ». Ceci entraînera également une hausse sensible des conflits liés à l’eau – l’ONU en estime le nombre à 263 depuis 2010- , avec pour conséquence une augmentation massive des flux migratoires, dont les guerres et persécutions sont une cause majeure.
Dans ce contexte, le coût de l’inaction serait donc immense. Ne rien faire ou ne pas assez faire aurait pour effets d’accroître considérablement les risques humains, géopolitiques, économiques et environnementaux.
Face à ce défi colossal, la communauté internationale a lancé plusieurs grandes initiatives, dont la Décennie de l’Eau (2018-2028)2, qui vise à mobiliser les états, les entreprises et les ONG pour mettre en place des programmes locaux visant à généraliser l’accès à des services d’alimentation en eau et d’assainissement gérés de façon durable.
Selon une étude menée par l’UNICEF, l’OMS et la Banque mondiale sur 140 pays3, fournir des services d’eau et d’assainissement à l’ensemble des populations non desservies coûterait 28,4 milliards de dollars par an, entre 2015 et 2030. Cela représente 0,10% du PIB des 140 pays inclus dans l’étude. De plus, soulignent les experts de l’ONU, « investir dans les infrastructures sanitaires et liées à l’eau est rentable. Le retour sur investissement est élevé, en particulier pour les plus vulnérables. L’effet multiplicateur pour chaque dollar investi est estimé à 2 pour l’eau potable et 5,5 pour l’assainissement ».
Carte : Disponibilité en eau douce en mètres cubes, par personne et par an (données 2007)
Source : https://www.cieau.com/connaitre-leau/les-ressources-en-france-et-dans-le-monde/ou-en-sont-les-ressources-en-eau-dans-le-monde/
1 https://www.un.org/development/desa/fr/news/sustainable/new-un-water-development-report.html
2 Home – International Decade for Action (wateractiondecade.org
3 https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/249610/9789242508475-fre.pdf?sequence